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Ce que la voiture autonome changera à l’assurance auto

Prévue pour une commercialisation aux alentours de 2020, la voiture autonome devrait connaître dans les prochains mois ses premiers tests en conditions réelles de circulation. Mais ce vieux rêve de l’homme moderne –conduire une voiture sans avoir à tenir le volant– pourrait-il se transformer en cauchemar ? Pour les assureurs, qui cherchent à anticiper les évolutions nécessaires de l’assurance auto, c’est déjà le cas, tant la voiture autonome pose des problèmes inextricables en termes de responsabilité.

La voiture autonome signe-t-elle la fin de l’assurance auto ?

L’avènement de la voiture autonome, c’est la promesse de routes plus sûres et d’accidents moins nombreux, réduits drastiquement grâce aux systèmes de prévention des collisions embarqués. Selon une étude du cabinet KPMG, ce système, aussi appelé « échange automatique d’informations entre véhicules », pourrait permettre de faire chuter la fréquence des accidents de la route de 80 % d’ici à 2040.

De nos jours, 90 % des accidents de la route ont pour cause une erreur humaine. De fait, l’automatisation de la conduite transformerait radicalement le paysage accidentogène routier, évitant 55 000 accidents, 30 000 hospitalisations et 3 500 morts (chiffres de 2015) par an, et faisant économiser 4 milliards d’euros à l’État sur la même période.

Un changement de paradigme qui promet de remettre en cause le fonctionnement actuel de l’assurance auto, un marché qui pèse quelques 20 milliards d’euros annuels. On estime généralement que ce chiffre pourrait être divisé par deux au cours du prochain quart de siècle. Dans ce schéma, l’arrivée progressive des voitures autonomes ne fait que renforcer une tendance déjà validée par des systèmes de plus en plus performants d’aide à la conduite sur les véhicules électroniques actuels.

La question se pose donc : avec la fin programmée des sinistres routiers, est-ce la fin de l’assurance auto ?

La reconfiguration à venir de l’assurance voiture

Avec une estimation actuelle de 30 % de la production automobile mondiale qui devraient être représentés, en 2035, par les véhicules partiellement ou entièrement autonomes, les assureurs sont confrontés à la perspective d’un bouleversement massif. Le contrat classique qui lie le conducteur à l’assureur (par exemple l’assurance auto proposée par MAAF) pourrait changer du tout au tout en s’adaptant aux futures règles de circulation.

Les assureurs sont conscients des enjeux, et s’interrogent d’ores et déjà sur les changements à venir. Toutefois, pour le président du GEMA (Groupement des entreprises mutuelles d’assurance), Pascal Demurger, la question essentielle reste celle de la responsabilité, qui est à la base du contrat d’assurance voiture d’aujourd’hui : qui sera tenu pour responsable dans une voiture autonome, étant entendu que personne ne tient le volant ? Contre qui l’assureur devra-t-il se retourner en cas d’accident :

  • Contre le fabricant automobile ?
  • Contre le concepteur des algorithmes qui permettent au véhicule de rouler seul ?
  • Contre l’entreprise qui a conçu les capteurs rendant possibles une circulation sans conducteur ?
  • Contre les pouvoirs publics, responsables de l’infrastructure routière adaptée ?
  • Contre le possesseur de la voiture, censé prendre les commandes dans une situation à risque ?

Les assureurs ont donc pris le taureau par les cornes. Ce qu’ils craignent ? La longue et difficile période de transition qui mènera à une uniformisation des modes de circulation aux alentours de 2100. Dans cet intervalle périlleux, les voitures autonomes seront de plus en plus nombreuses à circuler, mais elles partageront la route avec des véhicules traditionnels. En cas de sinistre entre une auto intelligente et une voiture avec conducteur, le règlement promet d’être d’une complexité infinie.

Questions éthiques et informatiques

La voiture autonome pose d’autres problèmes, liés à l’éthique d’une part, à la cybercriminalité d’autre part. Une voiture sans conducteur est une sorte de gros ordinateur sur roues ; et comme tout ordinateur dans le monde, elle est susceptible d’être la cible de pirates informatiques, qui pourraient pénétrer dans le système pour prendre le contrôle du véhicule. Cette éventualité est prise très au sérieux par les assureurs, d’autant plus que les exemples de hacking sont déjà chose courante (à lire dans cet article).

Restent les questions éthiques. La problématique, telle que posée par les assureurs, ressemble à une diapositive d’examen du code de la route : une voiture autonome est confrontée à une situation à risques multiples, mettons une route glissante, un animal stationné au milieu de la chaussée, et une voiture qui arrive en face. Comment va-t-elle réagir ? Choisira-t-elle de freiner subitement, au risque de déraper ? De contourner l’animal, malgré le véhicule arrivant de front ? Ou de percuter l’obstacle principal ?

En tout état de cause, les assureurs devront se plonger dans les algorithmes complexes qui détermineront les choix éthiques de la voiture autonome, et les valider ou demander leur modification. En cas d’accident, ils se tourneraient vers les concepteurs de ces algorithmes. De quoi bouleverser la relation avec le conducteur, qui cessera d’être l’interlocuteur privilégié de l’assureur, au profit du constructeur automobile. Un changement qui pourrait ne pas plaire aux automobilistes qui préfèrent garder le contrôle sur leur assurance voiture.

Quelles solutions pour la voiture autonome ?

À l’heure actuelle, les assureurs optent pour un système d’assurance auto sur la base d’une « responsabilité sans faute ». Dans ce système, la victime de l’accident serait indemnisée, tandis que les assureurs se mettraient d’accord entre eux dans le but de déterminer les responsabilités de chacun.

Mais d’autres solutions sont explorées. Parmi celles-ci, une idée est en vogue qui consisterait à confier aux fabricants eux-mêmes la prise en charge assurantielle de leurs voitures autonomes. Mais les assureurs abandonneront-ils si facilement l’un de leurs produits phares ?

Quoi qu’il advienne, la problématique de l’assurance voiture pour véhicules autonomes est déjà un casse-tête pour les assureurs. Une sorte de boîte de Pandore sur quatre roues, que l’évolution technologique a d’ores et déjà ouverte.

 

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