Le Mag Sport Auto

Entretien avec Ludovic Pezé de Motors Formula Team (MFT)

Aujourd’hui, Le Mag Sport Auto vous propose de découvrir plus amplement la jeune écurie Motors Formula Team (MFT). Une structure que nous vous avions déjà présenté il y a quelques semaines. Nous avons eu l’occasion de nous entretenir avec Ludovic Pezé, son fondateur, ainsi que Matthieu Pezé, l’un des pilotes de l’équipe.

Ludovic et Matthieu Pezé, deux frères dans l’aventure !

Le Mag Sport Auto : Bonjour Ludovic ! Peux-tu présenter l’équipe MFT, les membres, rôles et palmarès

Ludovic Pezé : Bonjour Julien ! L’aventure a été lancée en Mars 2014 avec des amis. Nous avons débuté avec des essais Formula Premium sur le circuit de Dijon Prenois. Dès la première entrée piste, nous avons battu record du tour. Une bonne surprise d’autant que pour une première, nous avons bien travaillé ensemble, ce qui nous a poussé à continuer. Puis, en Septembre 2014, nous avons poursuivi avec des essais Mitjet (Nogaro) avec un pilote Mauricien, Hansham Rewa. Jean-Philippe Dayrault était sur place et nous a confirmé le bon niveau de notre pilote. Hansham est d’ailleurs, à ce jour, le seul Mauricien à avoir piloté lors des sélections Auto Sport Academy.

Pour ma part, je suis le fondateur et manager de l’équipe. L’idée est venue de moi puis quelques amis sont venus m’aider (réseaux sociaux, sites web, etc). Un spécialiste du design est également venu nous rejoindre dans la foulée (logos, livre , etc.). Matthieu, mon frère fait partie des pilotes. Au total, six pilotes auto et un pilote moto composent l’équipe à savoir :

  • Emmanuel D’Hotman de Villiers (MUR), 3 fois Vainqueur Redbull Car Park Drift Maurice et 3 finales internationales Redbull Car Park Drift ( 2 fois à Dubai une fois à Oman ). Véhicule : Toyota GT86
  • Jaisan Newaj (MUR) : Double champion  Slalom de Maurice . Double champion des champions Maurice ( race of champions version Maurice ). 2 podiums au Redbull Car Park Drift Maurice . Véhicules: BMW E46 et Mitsubishi Evo VIII
  • Romain Sarazin ( FRA ) = Finaliste Rallye FFSA jeune. Vainqueur Nissan GT Academy. 24 hours of Dubai with Nissan GT4. Blancpain endurance series. GT4 Northern cup.
  • Matthieu Peze ( MRU ) = Essai F3 . Bapteme Mitjet 2L . Vainqueur Kart Endurance JCE Monaco
  • Hansham Rewa (MUR) = Demi-finaliste sélection Autosport 2008. Lauréat volant FR 1.6, Test mitjet 2L.
  • Lancelot Brassine ( BEL ) = 25 fun cup Spa. Essai FR 2.0 . Belgian BGDC championship et Rotax Max Challenge
  • Luc Mamet (FRA) : 6ème au général en Thundersport UK 5 podiums + 1 pole position. Engagé cette année en ETC ( superstock 600 ouverture du MOTO 2 CEV )

Pour la partie exploitation des véhicules, à l’avenir, nous discutons avec des équipes dont Racing Engineering, engagée en GP2. Par ce biais-là, nous gagnerons du temps en disposant d’une équipe complète et rodée comprenant, notamment, ingénieurs et mécaniciens.

LMSA : Pourquoi t’être lancé dans le projet MFT ?

L.P : J’ai toujours été baigné dans le sport automobile. Mon père était mécanicien, notamment en F3 Classique (Monaco historique). J’ai souvent assisté au GP de Monaco de F1 et travaillé au service général de ce Grand-Prix. Mais à la base, ma principale motivation était de représenter l’Ile Maurice en Sport Automobile.

LMSA : L’équipe dispose-t-elle de sponsors pour exploiter ses véhicules ?

L.P : Pour le moment je m’occupe juste de la gestion de carrière des pilotes (qui possèdent leurs propres véhicules) et de communiquer à l’international pour les sortir de Maurice. Je gère par ailleurs la préparation pour les courses, les relations médias et je les aide à se professionnaliser. Parmi mes attributions, je m’occupe également de trouver les bonnes pièces de compétition, qui sont très compliqués à trouver -et coûteuses- à Maurice. Et, bien sûr, c’est également moi qui suis en charge de trouver des partenaires, techniques et financiers. Mais pour répondre à la question, nous avons quelques sponsors locaux. Notre recherche de financements concerne donc le projet Endurance.

LMSA : Tu as vécu  Monaco. Peux-tu affirmer que ta passion a été, en partie, conditionnée par ton lieu de naissance ?

L.P : Oui, cela m’a vraiment influencé, compte-tenu de l’histoire de la Principauté avec l’automobile en général. En plus du Grand-Prix de Formule 1 ou encore, du Rallye de Monte-Carlo, le défilé incessant de supercars et autres voitures de luxe laisse des traces.

LMSA : Je sais que  tu aimes également te faire plaisir au volant, est-ce que tu comptes piloter avec l’équipe ?

L.P : En compétition, je ne sais pas trop car j’ai beaucoup de travail par ailleurs. Par contre, faire des essais (hors monoplace), je suis pour. J’adore tester des voitures et cela me permettrait de mieux comprendre mes pilotes et leurs ressentis.

LMSA : A titre personnel, quelles équipes/pilotes t’ont fait rêver ?

L.P : Michael Schumacher et Ferrari ! J’avais deux ans quand il a débuté sa carrière. Mais tout petit, mon père m’emmenait le voir courir, sur des compétitions de karting notamment. Et sinon, Mclaren et Ayrton Senna. Mon père a pleuré quand Senna est mort. J’étais très jeune mais je me suis dit qu’il y avait quelque chose d’anormal qui venait de se passer. Alors je me suis intéressé à ce pilote et j’ai commencé à collectionner casques, miniatures, etc. Puis, en 2006 je suis tombé sur le GP2 et Lewis Hamilton. Et quand j’ai vu sa façon de piloter, j’ai dit à mon cousin, qui m’accompagnait “lui, bientôt, il sera en F1 et il remportera le titre”… J’aime beaucoup également Pascal Wehrlein, Mauricien comme moi. J’ai pu le rencontrer, lui et sa famille et faire sa connaissance.

LMSA : Même question à Matthieu (Pezé) , qui pilote pour MFT ?

Matthieu Pezé : Mes références se situent plus au niveau des équipes que des pilotes. C’est Mclaren, quels que soient les pilotes, qui a toujours été l’équipe qui me faisait vibrer.

LMSA : Et niveau pilote, personne qui t’inspirerait ?

M.P : J’essaye d’avoir ma propre personnalité mais j’ai bien apprécié Lewis Hamilton, pour son attitude. J’admire beaucoup, également, Niki Lauda. Mais en gros, je m’inspire d’un peu tout le monde.

Et comment se passe la cohabitation entre les deux frères ? des conflits de temps en temps ?

M.P : (éclats de rires) Non car souvent nous sommes du même avis, nous marchons dans même direction. Après quand nous avons un désaccord, nous en rediscutons après, au calme. Mais nous verrons plus tard quand les enjeux seront plus importants. Enfin globalement nous nous entendons bien.

L.P : Quand il roule je le regarde et j’essaye de l’aider à s’améliorer, en débriefant après ses séances.

LMSA : Et il t’ écoute ?

L.P : Parfois il n’en a pas envie mais il fait l’effort, tout en sachant que les critiques sont bonnes pour lui.

M.P : Oui, certaines fois c’est à contre-coeur (rire), mais je lui fais confiance !

LMSA : Comment qualifieriez-vous votre relation ? D’abord fraternelle ou plutôt professionnelle ?

L.P et M.P : La relation est professionnelle mais amicale, entre nous comme avec les autres membres de la team. Mais je (Ludovic) suis probablement plus dur avec Matthieu qu’avec n’importe qui d’autre.

LMSA : Matthieu que t’apporte ton frère quand tu pilotes ? Sa présence est-elle un plus ?

M.P : Il va décrypter tout ce que je fais. C’est rassurant. D’autant qu’il sait comment me dire les choses.

LMSA : Matthieu quel est ton rêve “ultime” en tant que pilote ?

M.P : Mon rêve ce serait de piloter un jour pour Mclaren en Formule 1. Je garde cependant les pieds sur terre mais si un jour je peux le faire…Et sinon, gagner Indianapolis. C’est le côté rêve américain qui m’attire. J’ai toujours rêvé de piloter aux USA. Quand un pilote gagne là-bas, c’est un peu comme dans un film. On le traite comme un héros. Je pense aussi qu’il y a plus de pilotage et moins de politique (ce qui ne me plait pas en F1). Je crois que le talent est d’avantage regardé aux USA. Sinon, j’aimerai beaucoup gagner Le Mans.

LMSA : Ludovic, quel est l’objectif de l’équipe cette année ? Puis sur trois ou quatre ans

L.P : Deux objectifs concernant Matthieu : le faire rouler en F4 pour qu’il peaufine sa formation dans un environnement professionnel, tout en se comparant à d’autres pilotes. Le second, lui faire faire un essai avec une LMP3. Cependant, je ne veux pas le cantonner à rester dans l’équipe. S’il peut évoluer ailleurs, il sera, bien sûr, libéré. Mais je pourrais continuer à le suivre et à le soutenir en tant que manager, par exemple.

Concernant l’équipe en général, cette année, nous souhaiterions effectuer une ou plusieurs journées d’essais en LMP3 voire, un meeting, avec Romain et des pilotes externes, avec budget.

Et à moyen/long terme, nous visons le LMP3 d’ici deux ans et d’ici quatre ans, les 24h du Mans, avec un projet bien ficelé. Pour cela, nous espérons être en piste le plus rapidement possible sur une LMP3 avec Romain Sarazin et d’autres pilotes expérimentés. Nous étudions aussi la possibilité d’un programme en FR 2.0 VdeV pour Lance (Lancelot Brassine) et Hansham (Hansham Rewa).

LMSA : De quoi avez-vous besoin concrètement ?

L.P : Uniquement le financement car nous avons tout le reste : coaching, préparation voiture, relation médias, équipements. Celui qui prendra le pari de nous suivre soutiendra d’une équipe prête à rouler avec pilotes auto + moto. Concrètement, nous tablons sur un budget de 25 000 euros pour des essais + un meeting en F4. Pour ce qui est de notre programme en Endurance, le budget s’élève à environ 1 million d’euro.

LMSA : Vous avez changé le nom de l’équipe de Mauritius Formula Team à Motors Formula Team , pour quelle raison ?

L.P : A la base, j’ai lancé l’équipe dans l’ intérêt et dans le but de permettre aux jeunes de débuter dans une structure professionnelle mais je me suis rendu compte que Maurice était trop petit. Alors j’ai eu l’idée d’étendre le projet à l’ensemble de l’ Afrique. L’objectif étant de démontrer que ce continent est bel et bien entré dans l’ère du 21ème siècle. L’idée est aussi d’aider les pilotes, ingénieurs et mécaniciens africains, mais pas uniquement. Nous donnerons sa chance à n’importe quel talent, quelles que soient ses origines.

LMSA : Selon toi et pour parler sans “langue de bois”, le racisme existe-t-il en sport automobile ?

L.P : Oui, clairement. Lewis Hamilton en a été victime. Toutes les nationalités sont représentées en sport automobile, sauf les africains. Clairement, tu trouves beaucoup plus d’africains en athlétisme, par exemple. Il y a parfois un problème de moyens, c’est vrai mais aussi, dans d’autres cas, de discremination. Et l’ île Maurice est également touchée par le problème, au sein même de sa population.

LMSA : Pour finir, avez-vous quelque chose à rajouter ou un message à faire passer ?

L.P : J’aimerai, dans un monde idéal, que seule la compétence d’un individu entre en compte. Plus de notions d’âge, de sexe, d’orientation, d’origines ethniques. C’est désolant qu’un pays comme Maurice n’ait pas la volonté de promouvoir des projets ambitieux et internationaux pour montrer que le pays à progresser socialement ou sur le plan des technologies. On dirait qu’ils ne souhaitent pas sortir de leur zone de confort.

Mais pour en revenir à l’aspect discrémination, si demain j’ai l’opportunité, par exemple, de recruter et d’aider une femme en sport automobile, je le ferais avec plaisir. A condition qu’elle soit réellement dotée de talent, bien sûr. Idem pour n’importe quel pilote, quelle que soit sa nationalité. De manière générale, je milite pour une plus grande ouverture d’esprit dans le sport automobile.

LMSA : Ludovic et Matthieu, merci pour ce message positif et bon courage dans vos projets

L.P et M.P : Merci à toi et du soutien de Le Mag Sport Auto

 

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