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Rallye d’Australie 2014 : Interview de Jourdan Serderidis

Depuis le début de la saison nous suivons Jourdan Serderidis dans son aventure rallystique. Que ce soit en WRC ou même en ERC (Rallye de l’Acropole), le pilote grec répond avec gentillesse et disponibilité à nos questions après chaque rallye. Aujourd’hui, voici le debriefing de son Rallye d’Australie 2014 où il a malheureusement dû abandonner 300m après l’arrivée de la dernière spéciale.

LeMagSportAuto : 1/ Avant votre abandon vous étiez 18e au général et 6e en WRC-2, plutôt un bon résultat pour une première en Australie ?

Jourdan Serderidis : En effet, on a fait l’ensemble des étapes chronométrées et il ne nous a manqué que les 20 dernières kilomètres de liaison jusqu’au podium pour obtenir un fantastique résultat. Mais c’est la règle en rallye : il faut rejoindre le podium et le parc fermé.
Si on regarde les chronos par rapport à la concurrence, c’est très bien. Il ne faut pas oublier que 5 des 6 meilleurs spécialistes mondiaux étaient mes concurrents sur ce rallye. De manière générale, je pense que j’ai passé plusieurs étapes en Australie et mes progrès sont visibles dans les passages rapides et dans les courbes en glisse. Ce n’est pas encore fameux en freinage mais ce n’est pas non plus totalement mauvais. Par contre, sur le très sinueux, je pense que je suis dans le bon. Ca fait encore 4s/km par rapport au scratch en WRC-2 mais on se rapproche quand même.

2/C’est suite à une mauvaise réception après un saut que vous cassez la pièce à l’origine de votre abandon mais, quand on voit la vidéo cela aurait pu être bien plus grave, plutôt chanceux finalement dans votre malheur ?!

JS : Je ne dirai pas chanceux. Lors du premier passage, nous sommes passés « flat out » et on a atterri sans aucun problème 40 mètres plus loin. Lors de la power stage, on s’était dit qu’on ne prendrait pas de risques et j’ai freiné avant le « bump » puis mis les gaz à fond. Je ne m’explique pas encore pourquoi le nez de l’auto a piqué ainsi. Et en effet, la réception du jump a été assez « chaude »…

3/ Il semblerait que vous avez pu bénéficier de l’assistance M-Sport sur ce rallye, que vous a apporté ce soutien ?

JS : Pour des raisons logistiques et pratiques, nous avons en effet loué une voiture de M-Sport pour ce rallye, avec tout le service M-Sport. Que ce soient pour les tests, l’assistance proprement-dite ou l’encadrement, je ne peux que louer le professionnalisme d’un tel team. Mais c’est logique, c’est le team usine. Rien n’est laissé au hasard : les tests sont menés avec méthode et rigueur, l’information durant le rallye est communiquée via radio (nous sommes informés en temps réel des temps de nos concurrents par exemple), les réparations éventuelles sont planifiées avec un coordinateur, j’ai pu bénéficier d’une assistance médicale pour mon coude lors de ma petite sortie du premier jour, etc…

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4/ Dans quelle(s) condition(s) physique se trouve-t-on avant le rallye alors que le voyage a été éprouvant ?

JS : Je suis arrivé en Australie deux semaines avant le départ. Cela aide car le « Jet Lag » de 8 heures, cela prend pas mal de temps à absorber. Mais en ce qui me concerne, j’étais donc parfaitement en forme. Robert Kubica m’a avoué qu’il n’avait besoin que de deux jours pour absorber un tel décalage horaire. Selon moi, cela dépend des personnes.

5/Le Rallye d’Australie n’est pas le plus médiatisé du calendrier mais sûrement l’un des plus délicats à aborder. Quel est votre ressenti sur cette épreuve ? Quelles sont les différences majeures entre le tracé australien et ceux des autres rallyes terre ?

JS : C’est une très belle épreuve, avec des paysages vraiment beaux. Sportivement parlant, je pensais après les reconnaissances que le rallye n’était pas si difficile. Et puis, après deux spéciales, tout le monde s’est plaint du « grip » et de la vitesse, compte tenu de la variété des spéciales, avec un mixte de rapide (entre les arbres) et de sinueux et technique. Si on compare à la Pologne par exemple, c’est plus étroit et les arbres (cèdres) ont un diamètre moyen double. Il y a aussi ces fameux « bumps », sorte de petites bosses pas faciles à négocier et qu’il faut parfois sacrifier pour mieux aborder une courbe qui leur succède souvent.

6/En Grèce, en Pologne, en Argentine ou encore en Finlande le public est au rendez-vous et est exalté, et en Australie comment est l’ambiance ?

JS : L’Australie compte 23 millions d’habitants pour une superficie 15 fois plus grande que la France, donc le public est proportionnel à la densité de la population. En terme d’organisation, c’est ce qui se fait de mieux : planning parfait, encadrement souriant et efficace, accueil chaleureux. Mais à part l’organisation, j’ai trouvé le public en général très peu connaisseur : les Australiens préfèrent le tuning et les courses de vitesse pure avec des engins surpuissants.

7/ Pour cette fin de saison en WRC, vous participerez au Rallye de France et au Wales Rally GB. Quels sont vos objectifs pour ces deux dernières épreuves ?

JS : Et je fais aussi la Catalogne, ce qui me fera au total 7 courses en WRC-2. Je fais aussi l’East Belgian Rally la semaine prochaine et le Condroz en novembre, deux manches du Championnat de Belgique. Mon but est de continuer à progresser sur les deux surfaces et d’apprendre les parcours. Je pense que l’on peut peut-être placer la barre un peu plus haut pour le Wales GB, puisque j’en serai à ma deuxième participation. J’avais mis en début de saison un objectif de top-10 au classement final du WRC-2 mais après ma déconvenue en Australie et ma perte des 8 points associés à ma 6è place là-bas, je pense que cela va devenir difficile.
Au-delà de l’arithmétique, et après ma deuxième place au Rallye de Luxembourg et ce que j’ai montré en Australie, mon équipe commence à rêver de gros résultats. Mais, selon moi, c’est encore trop tôt. Pour l’East Belgian par exemple, je ne pense pas que l’on doit attendre une performance de ma part. Je trouve que le parcours est trop rapide et aveugle et que plusieurs concurrents connaissent le tracé par cœur. Ce n’est pas avec deux passages et quelques videos que je vais pouvoir me mesurer à eux. Mais cela reste une superbe préparation pour la France…

8/ On le voit depuis quelques semaines, cela s’active beaucoup au sujet de la saison 2015. Pouvez-vous nous dévoiler les grandes lignes de votre prochaine saison en rallye ?

JS : Nous ne pourrons dévoiler la stratégie de J-Motorsport qu’après le Condroz, début novembre mais il est clair que nous avons déjà dessiné les contours généraux. Je pense pouvoir dévoiler que je ferai 10 manches WRC-2 l’année prochaine, en rajoutant le Mexique, l’Allemagne et le Portugal à mon programme de 2014. Mais au-delà de mon programme personnel, c’est le projet de J-Motorsport et de ses clients qui me tient à cœur et que nous allons développer. Nous allons étonner pas mal de gens avec ce que nous envisageons de réaliser en 2015. De ce côté, nous sommes très ambitieux. Nous aurons le matériel et nous voulons proposer un service de qualité, associé à un suivi et un encadrement adaptés. Notamment vis-à-vis du ou des jeunes que nous allons supporter, au plus haut niveau. En déchiffrant convenablement ce que je viens d’écrire, on peut presque deviner ce que nous planifions …
Nous aurons plusieurs programmes, mais homogènes, complémentaires et… unicolores.

9/ Le Rallycross devient de plus en plus populaire, est-il envisageable de vous voir dans cette discipline prochainement ?

JS : Je suis encore un junior en rallye et j’ai énormément à apprendre. Une discipline à la fois et cibler ses objectifs, c’est ma devise.

Merci beaucoup à Jourdan Serderidis de nous avoir, une fois de plus, accordé un peu de son temps pour répondre à nos questions. Rendez-vous dans deux semaines pour le Rallye de France !

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